Intervention de Pedro Milheiro (FEVICCOM-Portugal) à la réunion euro-méditerranéenne

Camarades,

 Au cours des dernières années, le monde a souvent été confronté aux nouvelles et aux images de catastrophes humaines survenues en Méditerranée et en Europe et malheureusement la situation ne fait qu’empirer. Une chaîne humaine se déplace vers l’Europe utilisant tous les moyens et toutes les voies de transport possible et ils sont des milliers à mourir noyés dans les eaux de la Méditerranée, asphyxiés dans les soutes des bateaux ou dans des conteneurs, victimes de violence et de vols.

Des dizaines de milliers d’êtres humains – hommes, femmes, enfants et personnes âgées – partis de divers pays du Moyen-Orient et d’Afrique affrontent une multitude de dangers pour échapper aux guerres que leur ont apportées les forces impérialistes, pour fuir la destruction, l’insécurité et la misère à la recherche d’un abri, de paix, de sécurité et de travail en Europe.

 

Dès le début, FEVICCOM et l’UITBB ont toujours exprimé leur solidarité avec ces réfugiés et immigrés et plus concrètement avec toutes les victimes de cette catastrophe humaine qui, poussées par le désir naturel de vivre avec leur famille une vie digne, prennent toute sorte de risques, parfois au prix de leur vie.

La politique néolibérale d’appropriation des ressources naturelles est la cause réelle de cette catastrophe humaine et la responsabilité en incombe à ceux qui fomentent les guerres impérialistes et encouragent l’ingérence dans ces pays.

L’invasion et l’occupation de l’Afghanistan en 2001 et de l’Irak en 2003 par les États-Unis et leurs alliés ainsi que la destruction des infrastructures de ces pays et l’intervention de l’OTAN dans d’autres pays constituent la cause principale de ce drame humanitaire que vivent beaucoup de peuples de la région.

Plusieurs pays membres de l’UE ont également contribué à cette situation dans la mesure où ils ont appliqué les mêmes politiques erronées en coopération avec les États-Unis et l’OTAN. En tant qu’alliance politico-militaire, l’OTAN intervient de manière accrue dans cette région du globe, ce qui justifie la revendication de longue date des organisations syndicales demandant la dissolution et la disparition de l’OTAN.

Prétextant la promotion du printemps arabe, les interventions et ingérences militaires ont servi à camoufler les objectifs réels de leurs auteurs. Les interventions militaires qui se sont succédé ont mené à la destruction d’États internationalement reconnus tels     que l’Afghanistan et l’Irak, mais aussi la Lybie, la Syrie et le Yémen, pour en mentionner que quelques-uns.  Cette politique a ruiné la société, paralysé l’économie, mis en morceaux le système social et politique et anéanti l’appareil de sécurité et de défense de chacun de ces pays.

Ces États sont devenus des territoires sans droit, dépourvus d’activités économiques et d’organisation sociale, où la population est à la merci de l’arbitraire perpétré par des groupes et réseaux de trafiquants d’êtres humains de tout acabit. Objectivement, ces peuples ont été rejetés des décennies en arrière dans leur développement humain et leurs sociétés sont entrées dans une spirale de violence, de désordre et d’insécurité dont l’issue est difficile à prévoir.

Ce sont là les causes profondes de la situation actuelle et la responsabilité de cette catastrophe incombe aux États-Unis d’Amérique et à leurs alliés en Europe, au Moyen-Orient et en Afrique et dans certaines régions la responsabilité incombe directement à l’Union européenne.

Dans ce contexte, FEVICCOM et l’UITBB ont toujours rejeté la construction de nouveaux murs ainsi que les solutions sécuritaires de l’UE qui traduisent une absence d’humanité dans la recherche d’une solution à cette situation. FEVICCOM et l’UITBB récusent la xénophobie et demandent des actions résolues contre la violence à laquelle recourt l’extrême droite contre les réfugiés. Les problèmes existants ne sauraient être résolus par la poursuite des guerres impérialistes et de la politique de pillage des ressources naturelles, mais par une politique susceptible de garantir le développement économique et social des pays de cette région.

Aujourd’hui l’hypocrisie prévaut en Europe ; à preuve les agressions et l’ingérence des principales puissances européennes telles que la France, l’Italie et le Royaume-Uni, par exemple en Libye, en Syrie, au Mali, au Tchad, en République centrafricaine, en Somalie, en Érythrée, etc.  Ce comportement hypocrite va de pair avec les mesures sécuritaires adoptées par l’Union européenne à l’égard des immigrés de ces pays, ce qui se traduit par le renforcement dans le cadre des opérations de l’agence européenne Frontex de la présence de la marine militaire, afin d’empêcher le mouvement des migrants, alors qu’il y aurait besoin de la présence de gardes côtières chargées d’opérations de sauvetage dans une approche d’aide humanitaire. Hypocrisie dont témoigne l’adoption de directives anti-immigration, notamment la directive notoire relative aux mesures de retour des migrants ainsi que la stigmatisation continue de la migration en rapport avec le terrorisme.

Figées dans leur comportement hypocrite, les institutions européennes se limitent à porter le blâme sur les horrible réseaux de trafiquants d’êtres humains qui profitent du désespoir de milliers de personnes extrêmement vulnérables,  et passent sous silence le fait que ces réseaux naissent et prospèrent sur fonds d’immigration et du fait des politiques de relations étrangères adoptées par l’Union européenne dans l’indifférence totale de la communauté internationale.

FEVICCOM et l’UITBB déclarent le ras-le bol de ce cynisme, de ce silence et de ces paroles creuses de la part des institutions européennes et de la majorité des États membres. Il est temps de mettre un terme aux souffrances, à la mort et à cette terrible catastrophe humaine. Les migrants et les citoyens demandeurs d’asile ont le droit de vivre et de travailler en sécurité, ils ont droit à la protection sociale sur une base d’égalité et de solidarité.

Notre secteur d’activité, la construction, est celui qui tire un maximum de profit de cette situation par le travail informel et non déclaré, le travail clandestin et dans certains cas le travail d’esclave. Notre Confédération portugaise des syndicats prend part à la coordination syndicale de la Méditerranée (EUROMED), qui a mis en place un réseau syndical chargé de défendre les droits des travailleurs migrants dans la région.

FEVICCOM et l’UITBB doivent poursuivre leur action et combattre les politiques des gouvernements qui fomentent les guerres, ils doivent lutter contre le caractère prédateur des multinationales et des grands groups économiques, pour que la situation actuelle fasse place à une situation fondée sur une approche humaniste, sur la paix et le respect de la souveraineté des États et de la volonté des peuples, dans un partenariat efficace propice au développement économique et social de chaque pays, dans le respect des cultures respectives ainsi que de leurs organisations sociales et politiques.

À l’occasion de cette réunion euro-méditerranéenne de l’UITBB nous réitérons :

1) Que les politiques actuelles en matière de relations étrangères, de libre circulation des travailleurs et d’immigration sont totalement erronées et qu’elles doivent être remplacées par des politiques axées sur la paix et la coopération, sur le principe d’égalité des conditions,  qui rejettent toute forme de discrimination des migrants  et soient imprégnées d’humanisme et de solidarité avec les réfugiés et les demandeurs d’asile ;

2) Que notre solidarité s’adresse tout particulièrement aux réfugiés qui affrontent la mort pour échapper à la guerre ;

3) Que nous combattons les pratiques de dumping social avec leurs conséquences horribles pour la vie des travailleurs et les sociétés démocratiques dans lesquelles nous vivons.

 

À l’occasion de cette réunion euro-méditerranéenne de l’UITBB nous estimons :

1) Que l’émigration est un droit, mais qu’elle ne peut être un dernier recours pour échapper à la guerre et à la destruction ;

2) Que les migrants apportent une contribution essentielle à l’économie des pays d’accueil, y développent le cosmopolitisme ainsi que des relations interculturelles ;

3) Que précisément pour ces raisons matérielles et culturelles les pays d’accueil devraient se doter de politiques d’immigration amicales et égalitaires et combattre toute forme d’inégalités et de discrimination.

 

À l’occasion de cette réunion euro-méditerranéenne de l’UITBB nous revendiquons :

1) La révision de la directive sur les travailleurs détachés sur la base de l’application du principe de conditions égales sans discrimination et sans inégalités ;

2) La création d’une politique européenne commune en matière d’asile et de migration respectueuse des droits de l’homme, de la dignité humaine et du principe d’égalité ;

3) La dissolution et la disparition de l’OTAN ;

4) La pénalisation des pratiques d’exploitation des travailleurs par des employeurs sans scrupules ;

5) La coordination réelle de l’inspection du travail au niveau européen.

FEVICCOM et l’UITBB  valorisent et soulignent le rôle des travailleurs, du mouvement syndical de classe, des peoples et des organisations de paix dans la lutte pour la défense des droits des migrants, pour l’égalité entre les peuples et les cultures susceptibles de promouvoir l’édification harmonieuse d’une société de progrès. C’est la seule manière de créer des conditions de vie et de travail dignes, dans la paix et la sécurité. C’est la seule manière d’éviter les guerres impérialistes, la destruction et l’insécurité.

 

Pedro MP Milheiro

FEVICCOM

UITBB